Depuis plusieurs années, le Mali est victime d’attaques terroristes répétitives. Plusieurs personnes ont déjà perdu la vie et le nombre des déplacés ne fait qu’accroître. A cette situation jugée déjà difficile, vient s’ajouter la pandémie du « Covid-19 », qui limite les activités et les contacts humains. C’est dans ce contexte sécuritaire et sanitaire assez difficile, que les Maliens ont élu leurs députés.
Les électeurs des huit anciennes régions du Mali, étaient appelés aux urnes le 29 mars 2020 pour le 1er tour de l’élection législative. Ce scrutin est censé renouveler le mandat de 147 députés à l’Assemblée Nationale. Le taux de participation pour ce premier tour, a été estimé à 35,73% pour 7 663 464 électeurs inscrits. Seulement, 2 738 428 électeurs ont mis leur bulletin dans l’urne, selon le ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, structure chargée de la proclamation provisoire des résultats. Toujours selon cette même source, sur les 22.147 bureaux de vote du pays, 274 n’ont pu être opérationnels en raison de l’insécurité.
Pour la tenue de ce scrutin législatif maintes fois reporté pour diverses raisons, le gouvernement du Mali a voulu un large consensus autour du processus électoral. L’un des points sur lequel les acteurs devraient s’accorder, c’était le fichier électoral. A la demande de la classe politique, le gouvernement a saisi la commission électorale nationale indépendante (CENI) pour procéder à l’audit du fichier électoral, dès le départ.
Un comité inclusif d’audit du fichier électoral dans lequel figurent les représentants des partis politiques, fut installé, à cet effet, et présidé par la CENI elle-même. Les résultats de cet audit, n’ont fait l’objet d’aucune contestation. Ce qui était de bon augure. Cependant, l’apparition de la pandémie du Coronavirus a divisé les acteurs sur l’opportunité de tenir le scrutin. Certains ont appelé à son report mettant en avant le risque d’une contamination accrue qui ferait accroître la propagation du virus dans notre pays.
La peur d’une contamination au Covid-19
MOHAMED Ould Cheik DRAME, électeur, est catégorique par rapport au report du scrutin. « J’ai deux mots à vous dire sur le pourquoi du fait que je ne voterai pas. La première est liée au coronavirus et la deuxième est liée au fait que Soumaila CISSE (NDLR : Chef de file l’opposition) a été kidnappé. On ne sait pas où il se trouve. Normalement, pour cette raison, on devrait reporter les élections »
Adama SAMAKE, électeur inscrit dans le district de Bamako : « J’ai ma carte, mais je ne vote pas à cause du coronavirus. On nous a instruit de ne pas faire des attroupements. Pour moi, les centres de vote sont des lieux d’attroupement. Donc, je ne vote pas ». Son point de vue est partagé par la vieille Djenneba KOUYATE d’environ soixante ans, foulard sur la tête : « Je ne vote pas. Les élus ne se soucient pas de nos problèmes. Pendant l’hivernage, les caniveaux sont inondés pour non curage ».
D’autres, par contre, plaident pour le maintien du scrutin car, selon eux, cela permettrait d’éviter un blocage institutionnel à l’expiration du mandat actuel des députés. Ils ont toutefois appelé le gouvernement à prendre les dispositions nécessaires pour minimiser le risque de contamination au coronavirus.
Côté gouvernement, l’assurance a été donnée concernant le dispositif sécuritaire et sanitaire. Pour le premier ministre Dr Boubou CISSE, « ces élections constituent un acte important pour la continuité de la démocratie, elles sont vitales pour le pays…Le gouvernement mettra tout en œuvre pour assurer le bon déroulement du scrutin ».
Au premier tour, certains bureaux de vote ont été dotés de kits sanitaires (dispositif de lavage des mains , utilisation de gel hydroalcoolique, respect de la distanciation sociale dans les files de rangs et prise de température à l’entrée).
Ce premier tour a enregistré, cependant, quelques défaillances dans ce dispositif. Des candidats ont été enlevés en pleine campagne électorale par des groupes armés ; des bureaux de vote ont manqué de dispositif sanitaire. Mamadou COULIBALY, chef d’un Bureau de vote témoigne : « Dans l’ensemble, l’organisation s’est bien passée. Mais, il y a eu un manque de matériel de lavage de main ; les masques étaient insuffisants de même que du gel »
Ainsi, à l’issue du 1er tour, 22 députés sur les 147 ont été élus. Quant au second tour, il s’est tenu le 19 avril 2020 avec un taux de participation de 35,33%. En effet, les populations ont dû élire leurs représentants en pleine psychose du Covid-19. Les résultats provisoires des élections législatives indiquent que 21 partis politiques ont été élus sur une centaine pour représenter le peuple malien au Parlement.
En rappel, à la date du 23 avril 2020, le Mali comptait 309 contaminés au Covid-19 dont 17 décès et 77 guérisons. Les autorités sanitaires recommandent toujours le respect strict des mesures préventives afin de contrer la pandémie du Covid-19.
Adama DJIMDE